la guitare au XIXe siècle

La guitare au XIXe

XIXe siècle : réformes sociales et changement de paradigmes, rénovation de tout et du tout au tout. La guitare n’est pas en reste. Si elle a échappé au bûcher de la révolution libérale ça n’est pas sans conditions, il lui aura fallu faire peau neuve et refréner ses ardeurs. Il lui aura surtout fallu abandonner sa langue, refaire sa grammaire et se conformer aux mœurs de la société bourgeoise. 

Plus de rasgueado ! plus de abanico ! …Contenez votre fougue mademoiselle ! Désormais, vous soignerez le ton et comme tout le monde, vous vous tiendrez à l’exercice de la virtuosité.

Rentrez le ventre et gonflez un peu la taille ! Embourgeoisez-vous, ajoutez donc une corde ou deux à votre jeu et abandonnez vos choeurs et vos cordes tendres ! Abandonnez également les tablatures que vous utilisiez depuis des siècles et conformez vous à la portée et l’écriture solfégique comme vos confrères. N’allez pas vous prendre pour une reine comme à la cours d’autrefois et même si les gens vous aiment, pour l’orchestre n’y comptez pas trop, la portance de votre voix est trop faible et l’assemblage à vos semblables, disgracieux, mais pour nos petits salons feutrés, vous ferez bien l’affaire.

Apprenez donc à composer dans l’air du temps et concevez un tout nouveau répertoire sans garder trace de vos anciennes coutumes !

Ici encore, l’inspiration des serviteurs de la guitare n’aura pas manqué d’invention pour élaborer une musique raffinée et pleine de poésie. En voici quelques uns (même si Paris fait tourner les têtes et attire alors par ses « lumières » au point de faire des conversions de nationalité, reconnaissons aux natures espagnoles et italiennes la primauté en matière de guitare) :

Guitare baroque Vs Guitare romantique

((1)) Guitare baroque des XVIIe et XVIIIe siècles, montée de 4 chœurs (cordes doublées) et d’une chanterelle (première corde non doublée). On lui connait au moins trois accordages différents (Espagnol, Français, Italien) dont l’utilisation d’un « accord rentrant » impliquant des particularismes de jeu. ((2)) Guitare romantique du XIXe cordée avec 6 cordes simples (mi, si, sol, ré, la mi)

Ferdinando Carulli (1770, Naples - 1841, Paris)
Ferdinando Carulli (1770, Naples – 1841, Paris)
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Op. 333: No. 1 Moderato — par Uros Baric — Source : YouTube

Fernando Sor (1778, Barcelone -1839, Paris)
Fernando Sor (1778, Barcelone -1839, Paris)
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Grande Sonata Op 25 — par Petrit Çeku — Source : YouTube

Mauro Giuliani (1781-1829, Italie)
Mauro Giuliani (1781-1829, Italie)
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Guitar Concerto No. 1 in A major, Op. 30 — par Pepe Romero (en 1974) — Source : YouTube

Dionisio Aguado (1784-1849, Espagne)
Dionisio Aguado (1784-1849, Espagne)
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Introduction and Rondo no. 2 Op. 2 — par Drew Henderson — Source : YouTube

Matteo Carcassi (1792, Florence - 1853, Paris)
Matteo Carcassi (1792, Florence – 1853, Paris)
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Etude 7, Op.60 by Matteo Carcassi — par Simon Powis — Source : YouTube

Napoleon Coste (1805-1883, Paris)
Napoleon Coste (1805-1883, Paris)
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Le Départ — par Aniello Desiderio — Source : YouTube

Johann Kaspar Merts (1806, Royaume de Hongrie - 1856, Autriche)
Johann Kaspar Merts (1806, Royaume de Hongrie – 1856, Autriche)
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Elegy — par Karol Samuelčík — Source : YouTube

Musique au XIXe siècle

Musique au XIXe

Du XIXe siècle émerge une société nouvelle marquée par une redistribution des cartes. Marianne (la révoltée) vient de renverser Marie (la Vierge) et l’engeance de ses entrailles s’est emparée du trône de France. C’est le temps des grandes réformes, on soigne les apparences, on construit les nouveaux mythes. Versailles est abandonnée au profit de l’Hôtel de Ville. On rase le passé, on refait Paris et on refait l’histoire. Jules Michelet réécrit le Roman national et Napoléon s’en va en guerre pour le compte des nouveaux maîtres. La pensée des « Lumières » préfigurait l’élaboration d’une société matérialiste et sans Dieu, c’est ici qu’elle s’accomplie. C’est à cette époque également qu’émergeront des courants occultes de toutes sortes pour combler le vide de l’homme désormais face à lui-même.

Le XIXe, c’est aussi l’époque de nouvelles technologies (électricité, pétrole, matières synthétiques, machines, usines, locomotive, voiture motorisée, photographie, etc.) Que de merveilles, de maîtrise et de puissance pour occuper cette société en plein essor et en pleine effervescence…

En musique également, de grandes mutations s’accomplissent. On abandonne l’écriture contrapuntique pour l’harmonie. On opère une élévation du diapason, les cordes se tendent, le ton se durci, les exigences des compositeurs s’inscrivent sur les partitions et l’interprète perd les libertés qui lui étaient accordées…

C’est dans cette société triomphante, désireuse d’asseoir son autorité et l’éclat de sa puissance, que le nombre des pupitres d’orchestre augmente au point d’atteindre parfois des proportions colossales (face aux oeuvres intimistes qui se donnent par ailleurs dans les salons de la bonne bourgeoisie, le contraste est saisissant). L’époque est dans la démonstration de puissance, la « performance technique » sera valorisée et on cultivera le goût pour la virtuosité.

Après avoir défenestré et jeté au bûcher les luths et les clavecins pour « communion d’esprit » avec celui que l’on révoque, on installera sur le devant de la scène un instrument d’un « nouveau genre » : le piano.

Le piano maîtrise l’espace et s’impose, c’est une voix qui porte, qui résonne, qui peut exploiter les effets et les nuances, frapper fort ou caresser, ébranler, éblouir, émouvoir… impressionner le corps et la matière… De ces « nouvelles compétences » naîtra une « nouvelle musique », celle des Romantiques. C’est le temps des poètes maudis, où le pathétique se cultive comme un raffinement d’esprit, c’est le temps de la mélancolie exaltée.

Hasard de conjoncture, affaire de goût ou intention symbolique… quoi qu’il en soit, par la nature qui le fait, le piano se passera de l’art de l’ornementation (développé pour le clavecin) pour construire un langage musicale qui lui est propre.

La tentation est forte d’attribuer à l’homme du XIXe siècle le complexe de Narcisse, tourné vers lui-même et préoccupé à exprimer la profondeur des sentiments qui l’agitent avec une quasi « pornographie des affectes » (véritable contrepied à l’esprit du XVIIIe), mais devant la grâce et la beauté des oeuvres sublimes qu’il nous lègue, emporté par l’émoi, le coeur est acquis et la critique s’efface.

Voici quelques figures emblématiques de cette société :

Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Ludwig van Beethoven (1770-1827) allemand
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Symphony No.7 en La majeur op.92, 2e mouvement, allegretto — par Leonard Bernstein et le Wiener Philharmoniker — Source : YouTube

Niccolò Paganini (1782-1840)
Niccolò Paganini (1782-1840) génois-sarde
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La campanella — Source YouTube

Franz Schubert (1797-1828)
Franz Schubert (1797-1828) autrichien
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Der Leiermann — par Thomas Quasthoff et Daniel Barenboim — Source : YouTube

Frédéric Chopin (1810-1849)
Frédéric Chopin (1810-1849) franco-polonais
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Nocturne, op 9 no2 – par Maria João Pires – Source YouTube

Franz Liszt (1811-1886)
Franz Liszt (1811-1886) hongro-allemand
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Franz Liszt par Louis Robillard à l’orgue du Grossmünster de Zürich — Source : YouTube

Wilhelm Richard Wagner (1813-1883)
Wilhelm Richard Wagner (1813-1883) allemand
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Wesendonck Lieder, ‘Im Treibhaus’ — avec la voix de Jessye Norman — Source YouTube

Au XIXe siècle, se parallèlisent et se succèdent différents courants picturaux, dont le néo-classicisme, le romantisme, le symbolisme, l’impressionnisme, le naturalisme, le néo-impressionnisme, et les débuts du fauvisme. Ci-dessous, un petit panel de genres à travers lesquels on peut apprécier des esthétiques, des sujets, et des différences de traitement très contrastés.

En littérature, c’est le siècle des Nodier, Stendhal, Lamartine, Michelet, Balzac, Vigny, Hugo, Nerval, Musset, Flaubert, Baudelaire, Verne, Zola, Daudet, Mallarmé, Verlaine, Maupassant, Rimbaud, Barrès, Alain, Valéry, Rostand, Maurras, Bainville, Bonnard…

1781 - Johann Heinrich Füssli - Le Cauchemar
1781 – Johann Heinrich Füssli – Le Cauchemar
1800 - Balthasar Paul Ommeganck - Paysage avec un troupeau de moutons
1800 – Balthasar Paul Ommeganck – Paysage avec un troupeau de moutons
1830 - Eugène Delacroix - La Liberté guidant le peuple
1830 – Eugène Delacroix – La Liberté guidant le peuple
1832 - Jean-Louis Bézard - Prise du Louvre le 29 juillet 1830, massacre des gardes suisses
1832 – Jean-Louis Bézard – Prise du Louvre le 29 juillet 1830, massacre des gardes suisses (chargés de la protection du roi de France et du palais royal).
1857 - Jean-François Millet - Des Glaneuses
1857 – Jean-François Millet – Des Glaneuses
1863 - Alexandre Cabanel - La Naissance de Vénus
1863 – Alexandre Cabanel – La Naissance de Vénus
1870 - Hendrik Mesdag - Bomschuiten in de golven voor de kust van Scheveningen
1870 – Hendrik Mesdag – Bomschuiten in de golven voor de kust van Scheveningen
1872 - Claude Monet - Impression, soleil levant
1872 – Claude Monet – Impression, soleil levant
1874 - Alfred Sisley - Molesey Weir, Hampton Court, Morning
1874 – Alfred Sisley – Molesey Weir, Hampton Court, Morning
1874 - James Tissot - The Ball on Shipboard
1874 – James Tissot – The Ball on Shipboard
1875 - Gustave le Sénéchal 1840-1920
1875 – Gustave le Sénéchal 1840-1920
1876 - Gustave Moreau - Lapparition
1876 – Gustave Moreau – Lapparition
1880 - Jean Béraud - Le Pont des Arts par grand vent
1880 – Jean Béraud – Le Pont des Arts par grand vent
1882 - Jean Béraud - Rue du Havre
1882 – Jean Béraud – Rue du Havre
1883 - Maurice Fallies
1883 – Maurice Fallies
1886 - Arnold  Böcklin - L'île des morts
1886 – Böcklin – L’île des morts
1889 - Paris, Exposition Universelle
1889 – Paris, Exposition Universelle
1893 - Jean Désiré Gustave Courbet - Honfleur ou LEmbouchure de la Seine
1893 – Jean Désiré Gustave Courbet – Honfleur ou LEmbouchure de la Seine
1895 - George William Joy - Lomnibus de Bayswater
1895 – George William Joy – Lomnibus de Bayswater
Musique et instruments

Musique et instruments

L’instrument offre des possibilités originales à celui qui veut travailler la matière sonore. Si le jeu du clavecin s’accompagne d’un art de l’ornementation, c’est très probablement la nature même de l’instrument qui y a poussé.

Contrairement au piano qui permet une action importante sur l’intensité du son et la gestion de la résonance, le clavecin pour sa part ne le permet pas. Le son du clavecin est droit, court et l’intensité de la note n’est pas « ajustable ». Ainsi, pour agrémenter et nourrir la part expressive dans le jeu, on use d’un principe d’ornementation, c’est une façon de jouer sur « l’intensité », non pas par le « volume sonore » mais par « l’insistance » permettant la mise en valeur de certaines notes ou d’articulations du texte (intensité et insistance sont soeurs).

L’ornementation est une façon d’intensifier par un procédé plus intellectuel que physique. C’est là, « l’art de toucher le clavecin » et de le faire chanter…

C’est là tout le caractère et le bel esprit du XVIIIe qui cultive l’art de dire avec élégance, avec noblesse, avec de la tenue et de la retenue.

Domenico Scarlatti, Sonata en Ré mineur K32 [Aria] – par Ruggero Pilla

Sublime !! les 555 Sonates de Domenico Scarlatti jouées par des figures majeures du Clavecin, ici (Merci France-musique !) : https://www.youtube.com/hashtag/scarlatti555

Schémas d’ornementations :

ornementations, clavecin
ornementations
Edin Karamazov

Edin Karamazov

En voici un autre… de guitariste « hors des standards ».

On retrouve chez lui un « sens du phrasé » typique des Jazzman avec un jeu souple et une éloquence naturelle. Ici, on est loin des raideurs institutionnelles, la musique vie et respire… Karamazov entre dans la matière, il la travaille, il l’accroche et la modèle généreusement.

J.S.Bach, Suite pour violoncelle No. 2 – BWV 1008
J.S.Bach, Chaconne pour Violon, Partita BWV 1004
Leo Brouwer, Sonata de los Misterios
Tango

Tango !

En tête d’affiche, Rubén Juárez, bandonéoniste de Buenos Aires, personnage charismatique et envoutant qui accompagne ici la grande Amelita Baltar un titre mythique.

Elisey Mysin

Enfants prodiges

Ils se distinguent par des compétences exceptionnelles, d’autant plus saisissantes qu’elles émergent dès l’enfance.

Teo Gertler, Tchaikovski, Meditation
Elisey Mysin, Concerto de Mozart n. 23 en la majeur K. 488
Alexandеr Malofeev, Camille Saint-Saens, Concerto pour piano No 2, en Sol mineur, Op.22
Daniil Trifonov, 8 ans, au concours d’A.D. Artobolevskaya
Cynthia (Xinyan) Sun plays Caprice No. 24 by Niccolò Paganini
Илья Мискевич исполняет Roland Dyens “Tango en skai”
Ritsu

Ritsu joue Bach, Haydn, Grieg, Khachaturian, voir ici https://youtu.be/GOUzcrihR1k?feature=shared

Chloe Chua joue Vivaldi, Les quatre Saisons
Yuja Wang joue Claude Debussy, Arabesque N°1 en Mi majeur
Jonah Ho, 5ans, joue Chopin, Fantaisie Impromptu en Do dièse mineur Op.66
Carles Trepat

Carles Trépat

Carles Trepat est un guitariste catalan né Lérida en 1968. Il joue sur une authentique guitare d’Antonio de Torres de 1892 cordée en boyau et en soie.

Carles Trepat est comme sa guitare, hors du temps et des standards. Ici, il n’y a rien de surfait, rien d’ostentatoire, rien de démonstratif… la musique se vit intimement et se livre comme une confidence. Carles Trepat n’interprète pas un répertoire, il le perpétue !

1 heure de concert exceptionnel :

Sergueï Rachmaninov

« Sergei Rachmaninov (alias Serge Rachmaninoff 1873-1943) était un pianiste et compositeur russe surtout connu pour ses concertos pour piano et ses symphonies. Il surmonta les ravages de la critique et plusieurs années de dépression pour créer des œuvres qui sont aujourd’hui parmi les plus populaires et les plus jouées de tous les compositeurs du XXe siècle. Rachmaninov est le dernier du groupe de compositeurs connus sous le nom de “romantiques russes”. » (https://www.worldhistory.org)

Écouter les émissions sur France-Musique

Prélude en do dièse mineur, op. 3, n° 2 : Carême, par Marta Desianova